Au-delà des habitudes et coutumes de communication déjà mentionnées, lorsque l’on travaille avec des Néerlandais, certaines pratiques diffèrent : la gestion du temps est séquentielle, la notion de hiérarchie n’est pas très marquée alors que l’initiative personnelle et l’autonomie sont privilégiées. On apprend à travailler en équipe presque dès le berceau et on cherche le consensus pour les décisions importantes, le fameux « polder model ». Tout cela avec une approche très pragmatique donnant la priorité à l’action plutôt qu’à la réflexion. On note aussi des différences dans la conduite des réunions et dans la façon de tenir ses engagements.

Gestion du temps

« Druk, druk, druk », « Débordé »

Alors que les Français ont une gestion du temps plutôt parallèle, les Néerlandais gèrent leur temps de façon séquentielle. En France plusieurs choses peuvent se dérouler en même temps, les horaires ne sont pas forcément respectés à la minute près, un quart d’heure de politesse est même prévu dans les règles de bonne conduite. Aux Pays-Bas, les évènements sont planifiés de façon précise les uns après les autres, l’horaire des rendez-vous est respecté. Il est même de bon ton d’arriver 5 minutes en avance, on montre ainsi que l’on a tenu compte d’une éventuelle marge de retard. Ces agendas bien remplis donnent à tout le monde l’impression d’être débordés en permanence, planifier un rendez-vous peut parfois être un véritable challenge.

Hiérarchie

« Alle stemmen gelden », « Toutes les voix comptent »

La société néerlandaise étant beaucoup plus égalitaire, les contacts existent sans distinction des niveaux hiérarchiques. Il n’est pas indispensable de passer par le niveau hiérarchique supérieur pour prendre des décisions et avancer. Bien entendu, les validations importantes se font de façon concertée mais pas selon le modèle hiérarchique que nous connaissons. Cela est un avantage pour un ZZPer, vous pouvez travailler directement avec votre interlocuteur sans attendre les multiples validations qui pourraient vous freiner dans votre projet.

Initiative personnelle et autonomie

« Het heft in handen nemen », « Prendre les choses en mains »

L’initiative personnelle, l’autonomie et la capacité à travailler en équipe sont trois aspects imbriqués qui font partie intégrante de la vie professionnelle aux Pays-Bas.

Dès l’école primaire, les enfants néerlandais sont stimulés à se responsabiliser en menant à bien des projets de façon autonome. Définir des objectifs, trouver des sources d’informations, imaginer et mettre en œuvre un plan d’action puis présenter ses résultats à un groupe. Ces projets sont parfois individuels mais plus souvent en groupe pour s’initier au travail en équipe.

Dans une entreprise, on attend de chacun qu’il mette en œuvre les idées qui lui tiennent à cœur et entraîne à sa suite une équipe qu’il saura motiver en partageant son enthousiasme. Comme la hiérarchie est moins lourde, l’initiative personnelle a une grande place. Cela est également valable pour un ZZPer qui ne devra pas s’attendre à être dirigé pendant sa mission, mais au contraire faire preuve d’autonomie et prendre des initiatives en cours de parcours.

Travail en équipe

« Samen de schouders er onder zetten », «Y mettre tous ensemble un bon coup d’épaule »

Les Néerlandais ont une aptitude particulièrement développée pour travailler en équipe. Mettre en commun les énergies pour atteindre le but déterminé, partager les tâches et s’aider les uns les autres lorsque c’est nécessaire vont de soi. Ils aiment vraiment faire les choses ensemble, et fêter leurs succès une fois le but atteint. Même si le ZZPer ne fait pas partie d’une équipe de façon formelle, il est important d’avoir conscience de cet aspect pour comprendre comment travaillent ses clients et dans certains cas, s’intégrer de façon ponctuelle à une équipe de travail.

Consensus

« Polder model », « La méthode du Polder »

Alors que l’initiative personnelle permet à chacun d’avancer de façon individuelle, les décisions importantes sont prises en commun. La prise de décisions de façon consensuelle est facilitée par l’absence de hiérarchie stricte et la forte autonomie, c’est le fameux « polder model ». Chacun a son mot à dire, exprime son point de vue et ses contraintes, on s’écoute, on fait des concessions jusqu’à l’obtention d’un compromis acceptable par chacun. Cela diffère beaucoup de la prise de décision hiérarchique française où, après avoir pris connaissance des différents points de vue, seul le patron décide.

Pragmatisme

« Gaan met die banaan ! », « Partir avec cette banane!» = foncer

Même si cette approche peut paraître laborieuse, il faut avoir à l’esprit que les Néerlandais sont très pragmatiques. Contrairement aux Français, ils n’ont pas besoin de soupeser indéfiniment le pour et le contre d’une décision avant de se lancer, « On commence et on verra bien en cours de route où cela nous mène. Et, si finalement on réalise que ça n’était pas une bonne idée, on change de cap. » L’efficacité et la rapidité priment sur la précision. Cela signifie que le démarrage d’une collaboration est généralement beaucoup plus rapide. En tant que ZZPer, il faut donc oser se lancer avant d’avoir obtenu toutes les validations qui seraient nécessaires en France. Une bonne idée, un objectif et on se lance, vive la liberté d’entreprendre !

Avancer sans tergiverser

« Vallen en opstaan », « Tomber et se relever », « Qui ne tente rien n’a rien »

Il en résulte parfois des écarts de parcours qu’un Français percevrait comme un échec, voire même une faute. Si les conséquences ne sont pas trop importantes (entendez perte d’argent), on considère que c’est une expérience intéressante qui permet de progresser puisque l’on apprend de ses erreurs. De façon imagée : « On se relève, on secoue ses plumes et on repart ! » Aucun sentiment d’avoir échoué mais au contraire la fierté d’avoir tenté quelque chose et la conviction que c’est le meilleur moyen d’avancer.

En réunion

« Meedoen is belangrijker dan winnen », «Il est plus important de participer que de gagner »

Le mode de communication et les habitudes au travail se reflètent dans la manière de conduire des réunions. Un ordre du jour précis a été établi et une personne est désignée pour animer la réunion. Ces garde-fous sont nécessaires car chacun intervient de façon spontanée pour exprimer son point de vue. Parfois au moment même où une idée lui vient à l’esprit. Cette idée n’est donc pas encore finalisée, elle se précisera tout en parlant, ou bien quelqu’un d’autre rebondira dessus pour la faire évoluer, ou bien on l’abandonnera car cela n’était finalement pas une bonne idée. Ici aussi, on a toujours droit à l’erreur, il vaut mieux émettre une idée ou poser une question peu pertinente que de ne pas participer.

Par exemple, un stagiaire fraîchement arrivé pourra sans complexe interrompre un membre de la direction pour lui exposer son point de vue. Comme il s’agira d’une vision nouvelle sur le sujet, son avis a même des chances d’être suivi. Et il sera bien vu car en réunion, plus qu’ailleurs, il est important de participer. C’est une occasion à ne pas louper pour un ZZPer de se montrer proactif et impliqué. Et pour cela, il faut réussir à s’insérer dans la discussion, ce qui n’est pas toujours facile lorsqu’on n’est pas habitué à ce fonctionnement. Sans oublier que le style de communication rapide s’applique ici plus qu’ailleurs puisque l’agenda et le temps de réunion doivent être respectés. Il arrive qu’une réunion dure plus longtemps que prévu, cela concerne généralement des réunions particulièrement «importantes », réunissant par exemple toute une équipe de direction, mais c’est à éviter pour une simple réunion ‘de travail’.

Le paradoxe néerlandais

« Aspraak is afspraak », « Tenir ses engagements »

Il est important de souligner une autre différence entre les deux pays dans la mise en œuvre d’un projet : son organisation et la fiabilité de son déroulé. Nous avons vu que la structuration d’un travail aux Pays-Bas est rapide, les rôles de chacun définis, le rétroplanning fixé. Mais l’absence de pression d’une hiérarchie fait que, dans la pratique, les engagements ne sont pas toujours respectés et que de nombreuses relances, en référence à la décision de consensus, soient nécessaires pour que les tâches convenues soient effectuées. Ces relances ne sont cependant pas vécues comme un affront, elles font partie de la culture néerlandaise (l’absence de relance serait le signe d’une moindre importance du projet), la personne concernée s’excusera et s’engagera à respecter désormais ses engagements.

Cet article a été rédigé par Corinne CANTOR

Site internet : www.corinnecantor.com

Cet article fait partie des publications suivantes :


– La fiche « Travailler avec les Néerlandais »
– Le guide de l’autoentrepreneur francophone aux Pays-Bas