Ce mouvement, qui rendait accessible la spiritualité aux laïcs, favorisa la diffusion des thèses luthériennes puis calvinistes à travers les Dix-Sept Provinces (englobant la Hollande, la Zélande, la Belgique, le Luxembourg et une partie du nord de la France) réunies sous l’autorité de Charles Quint.

Dans les Dix-Sept Provinces, la répression de la Réforme fut sévère. Dès 1521, Charles Quint interdit les idées de Luther. Quatre ans plus tard, le premier catholique à être devenu luthérien est brûlé vif à La Haye. Malgré cela, à partir de 1550, le calvinisme se répand dans le pays depuis le sud de la Wallonie où œuvrent des pasteurs francophones. « Si le calvinisme l’a emporté sur le luthéranisme, c’est parce que Calvin faisait preuve de plus d’indépendance par rapport au pouvoir politique », estime le pasteur Riemer Roukema, professeur du Nouveau Testament et du christianisme primitif à l’Université de théologie protestante, déménagée de Kampen à Groningue en 2012. La rapide diffusion du calvinisme aux Pays-Bas s’explique aussi par le fait que la Réforme se répandait surtout dans les villes parmi les populations sachant lire. Or « dans ce pays de négoce, déjà très urbanisé au XVIe siècle, les bourgeois lettrés étaient nombreux », rappelle Andréas Lof, pasteur néerlandais à Paris. Surtout, les idées protestantes ont servi de « levier » – selon l’expression de Riemer Roukema – pour s’opposer à l’occupant espagnol. « Les groupes qui se retrouvaient pour lire la Bible et les écrits de Luther et Calvin, considéraient que la foi prêchée par l’Église catholique n’était pas fidèle aux Évangiles », raconte Dick Maagdelijn, historien de formation et membre du consistoire de l’Église wallonne de Leyde. Rassemblées autour du prince d’Orange, Guillaume de Nassau, des aristocrates majoritairement calvinistes – appelés par dérision « les Gueux » – s’élèvent contre la répression menée par les troupes du roi Philippe II, fils de Charles Quint, et mènent la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568-1648).

Les débuts du protestantisme hollandais sont donc liés à l’indépendance des Sept Provinces, futur royaume de Hollande. En devenant religion dominante au cours du XVIIe siècle, le calvinisme va contribuer aussi au développement économique du pays. Amsterdam est alors la ville la plus opulente d’Europe. Et Leyde, la ville natale de Rembrandt (1606-1669) où Guillaume d’Orange – pour remercier la cité d’avoir résisté à l’armée espagnole – fait construire, en 1575, la première université calviniste d’Europe, devient un phare intellectuel.

Ce développement profite des deux vagues de protestants qui trouvent « Refuge » aux Pays-Bas : au XVIe siècle, celle des Wallons fuyant les troupes espagnoles ; au XVIIe siècle, celle des huguenots après la révocation de l’Édit de Nantes, en 1685. Ces huguenots – dont le nombre est estimé entre 50 000 et 75 000 – ont « généralement bien réussi, notamment dans le textile et le commerce », poursuit Dick Maagdelijn. « Le Siècle d’or aux Pays-Bas a été profondément imprégné par le calvinisme », ajoute Riemer Roukema.

Source La Croix …